Pour rappel, la gestation pour autrui, ou GPA, est une pratique de procréation à l’occasion de laquelle une femme, qu’on appellera mère porteuse ou gestatrice, est inséminée par un embryon ; si (comme cela est prévu) elle tombe enceinte et accouche d’un enfant, celui-ci sera remis à la naissance à la personne ou au couple qui a sollicité la mère porteuse et lui a fourni l’embryon ; les personnes qui constituent ce couple commanditaires sont appelé « parents intentionnels ».
La mère dite porteuse ne donne normalement pas son ovule pour constituer l’embryon ; elle se contente de prêter (ou louer) son ventre pour que l’embryon puis le bébé s’y développe jusqu’à l’accouchement.
C’est là que les choses se compliquent : les parents commanditaires peuvent donner un embryon constitué avec les gamètes de l’homme et l’ovocyte de la femme, auquel cas ils seront alors les parents génétiques du bébé, ou alors, s’ils ne le peuvent pas, avoir recours à des dons de sperme ou d’ovocyte, voire les deux.
Les parents commanditaires peuvent donc être les parents génétiques, mais il se peut aussi que l’un d’entre eux seulement soit un parent génétique, ou aucun des deux.
Il y a donc une relation entre trois, quatre, voire cinq personnes (deux parents commanditaires, une mère porteuse, et éventuellement un donneur de sperme et une donneuse d’ovocyte).
Il peut enfin y avoir des GPA gratuites ou des GPA onéreuses (ou commerciales), et ce sont ces dernières qui sont considérées d’un point de vue éthique comme les plus dangereuses : on va jusqu’à parler de « tourisme procréatif » pour désigner ceux qui se rendent à l’étranger pour bénéficier d’une GPA, qui est à l’heure actuelle interdite en France.
Le terme est violent mais la réalité dans certains pays l’est tout autant : on pense à l’industrialisation de la GPA et notamment aux « cliniques » indiennes spécialisées, dans lesquelles des centaines ou milliers de femmes pauvres sont « utilisées » pour donner naissance à des enfants de commanditaire fortunés.
Bien évidemment il s’agit de cas extrêmes et la réalité de la GPA n’est heureusement pas toujours celle-là ; il se peut également que la mère porteuse s’inscrive dans une démarche altruiste, par exemple pour aider un couple qu’elle connaît à procréer, et même s’il y a une indemnisation, cela n’en fait pas mécaniquement une démarche purement commerciale.
En France la GPA est actuellement interdite au nom du principe d’indisponibilité du corps humain.
Certains couples vont donc à l’étranger pour bénéficier d’une GPA : quid lorsque les parents reviennent en France avec le bébé, notamment au moment de la retranscription de l’acte de naissance ?
Le bébé a en effet nécessairement un acte de naissance étranger puisqu’il est né dans un autre pays.
La jurisprudence française accepte aujourd’hui de reconnaître la filiation du père biologique : il faut que l’acte de naissance reflète la réalité et donc que le père du couple commanditaire ait fourni ses propres gamètes.
Sera donc retranscrit en France l’acte de naissance qui indique le père biologique comme père.
En revanche la femme du couple commanditaire ne pourra pas être considérée comme mère, et ce qu’elle soit ou non la mère biologique (c’est-à-dire qu’elle ait ou non donné son ovocyte) : l’acte de naissance qui indiquent la commanditrice comme mère de l’enfant ne pourra pas être retranscrit en France, car seule la femme qui a accouché (en l’espèce la mère porteuse) est considérée par la loi française comme étant la mère.
En ce qui concerne la mère, la seule réalité que le juge français veuille connaître, c’est la réalité de l’accouchement, pas celle de la génétique.
La femme du couple commanditaire pourra en revanche adopter l’enfant dans le cadre d’une adoption (simple puisque cet enfant est réputé avoir déjà une mère).
La jurisprudence est évolutive en la matière ; mais on se gardera ici de tout jugement de valeur.
Il serait trop facile de s’afficher dans une posture et de désigner tel ou tel avis comme progressiste ou rétrograde, conservateur ou libéral, libertaire ou liberticide.
L’envie d’avoir un enfant est légitime y compris lorsque la nature ou la santé des parents y fait obstacle, mais la volonté du législateur d’éviter des dérives et l’exploitation commerciale de la misère humaine l’est également : il s’agit de questions d’éthique complexes et il n’y a pas de réponse simple.
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